La maïeusthésie apporte un regard neuf, un regard différent sur l’accompagnement psychologique des individus. En cela, cette approche thérapeutique change réellement les paradigmes et théories de la psychologie et ce à plusieurs niveaux.
Le paradigme du symptôme : Et si on regardait le symptôme et le patient autrement ?
Il est courant dans diverses approches thérapeutiques d’envisager le symptôme comme étant un dysfonctionnement, un problème à corriger, à supprimer, considérant ainsi le patient comme étant un individu malade qu’il faudrait guérir.
La maïeusthésie elle, considère le patient dans toute sa dimension existentielle, elle ne le voit pas comme étant malade, ou comme ayant un dysfonctionnement en lui, elle voit plutôt un Être en souffrance manifestant inconsciemment le désir de mettre au monde un part de lui à travers la manifestation d’un symptôme.
Le symptôme n’est ainsi plus considéré comme le reflet de quelque chose de négatif, il n’est pas là « à cause de » quelque chose ou quelqu’un mais « spécialement pour » aller retrouver et rencontrer une part de Soi autrefois clivée. Il est la balise GPS qui permet de ne pas perdre cet Être de Soi qui à un moment donné a été clivé dans la zone d’inconscient par un élan protecteur de notre structure psychique.
Si le symptôme est vu comme l’expression d’un désordre à évacuer, il risque de découler de cet a priori une systématisation dans le regard du thérapeute qui ne permettra plus d’entendre la réalité du vécu du patient.
Le paradigme du corps : Quelle place a-t-il en psychothérapie ?
Il est vrai et même courant aujourd’hui de considérer certains symptômes comme étant psychosomatiques, c’est-à-dire qu’ils seraient l’expression d’un mal être psychologique qui s’exprimerait à travers une manifestation ou un trouble physique. Dans plusieurs approches, le corps est écouté, interrogé, examiné…mais est-il vraiment entendu ? L’est-il vraiment dans l’expression de sa propre souffrance ? Habituellement la psyché est considérée comme faisant partie du corps, la maïeusthésie propose de considérer le corps comme faisant lui partie de la psyché, comme étant un Etre à part entière, comme ayant parfois besoin d’exprimer une douleur différente de celle de la psyché et même si cela concerne le même événement traumatique.
Prenons par exemple un individu ayant subi une greffe d’organe. Cette personne peut être en paix dans sa psyché suite à cette greffe sachant que cela lui a surement sauvé la vie… mais parallèlement le corps peut lui vivre cette opération comme un réel traumatisme, ne pas vouloir de ce nouvel organe. Le corps exprime dans cet exemple une souffrance différente de celle de la psyché qu’il convient d’écouter avec beaucoup de délicatesse afin de ne pas se perdre.
Le paradigme de la posture : Distance thérapeutique ? Neutralité ? Non savoir ? Quelle posture adoptée pour un thérapeute ?
Il est bien courant d’entendre qu’il faut garder une distance thérapeutique avec son patient et qu’il faut faire preuve de neutralité pour ne pas être affecté, qu’il faut « savoir » à la place du patient car lui étant dans un état de souffrance psychologique n’est pas capable de savoir, il nous faut donc analyser, interpréter pour lui.
La maïeusthésie n’est en rien supérieure aux autres approches psychothérapeutiques, bien au contraire, elle se veut être une approche intégrative et nous pouvons y retrouver des analogies avec les autres. Bien plus qu’une méthode, elle est plutôt un outil qui peut être assimilé avec d’autres psychothérapies, car tout se joue au niveau de la posture du praticien. L’ouverture, la rencontre, la reconnaissance permettent l’apaisement du patient ainsi que la disparition de son symptôme et ne peuvent exister si le praticien n’a pas intégré cette posture.
Je parlais un peu plus haut de la fameuse distance thérapeutique et de la neutralité du praticien. Ces deux postures ne servent qu’à protéger le thérapeute afin qu’il ne soit pas affecté par l’historique de son patient.
La bonne distance avec le patient c’est quand il n’y en a pas, le praticien est censé être en « tact psychique » avec son patient, pour que l’information passe entre deux Etres, et non en « distance » si minime soit elle. Si distance il doit y avoir, elle doit être prise avec la circonstance ou le problème mais jamais avec l’individu. Le praticien est en proximité avec le patient, touché par l’Etre qu’il est, et totalement en alliance avec lui durant toute la démarche thérapeutique. Je reprendrai pour illustré mon propos les mots du fondateur de la maïeusthésie Thierry Tournebise, « le thérapeute doit « être distinct » sans « être distant » ».
Etre distinct c’est ne jamais se « mettre à la place » de son patient car cela refléterait uniquement nos ressentis face à un événement que l’on n’a pas vécu et cela ne prend en aucun cas de la nature et de la mesure de l’émotion ressentie par le patient lui-même. Et sans « être distant », car la distance thérapeutique éloigne le patient de son thérapeute et l’éloigne aussi de lui-même.
La neutralité elle, n’a pas sa place en maïeusthésie car prioriser l’Être permet au praticien d’être touché sans être affecté, tourné vers les Êtres et la Vie, il a une intention de validation existentielle du Soi. Si au contraire il a priorisé l’événementiel ou l’émotionnel, il risque d’être spontanément affecté par la nature dramatique des faits ou des ressentis.
Autre point crucial de la posture du thérapeute est le « Non Savoir », un praticien désireux d’accompagner des patients dans un cheminement psychologique doit pouvoir considérer le « non savoir » comme étant une source de compétence et à l’inverse considérer le « Savoir » comme un handicap dans sa pratique. Bien évidement, il est au fait des structures dynamiques invariables de la psyché et de ses mécanismes, mais à part cela, il ne sait rien. Il ne sait pas à la place de son patient, il ne sait pas comment son patient à vécu certains événements marquants de sa vie. Il ne peut donc ni supposer, ni interpréter, ni analyser. Il doit seulement être à l’écoute de son patient et lui demander tout simplement à Lui pour être le plus juste et le plus pertinent possible.
Le paradigme du « mauvais » à réhabiliter :
En maïeusthésie, le praticien ne cherche pas de zones à combattre, mais des zones de rencontres, de retrouvailles en attente de reconnaissances. La posture ne se fabrique pas, elle se vit, il faut de la congruence.
Les postures d’enquêteur, de chercheur, de correcteur sont loin d’être les plus efficaces, le thérapeute ne cherche pas et n’est pas interpeller par ce qui se cache, il s’ouvre tout simplement à ce qui appelle à la conscience de son patient à être vu et entendu. Ce qui appelle et une zone sacrée et inestimable oubliée.
Il y a un réel changement de paradigme entre le fait de vouloir corriger une erreur et vouloir rencontrer l’Être en face de nous et de l’aider à intégrer ce qui, en lui, n’avait pas encore trouvé sa place.
Je conclurai en disant simplement que le problème avec les paradigmes, c’est qu’ils peuvent nous aveugler face à l’essentiel et les autres chemins possibles. Ne restons pas prisonniers de ces paradigmes sur lesquels le thérapeute appuie ses raisonnements. Les paradigmes sont seulement des outils, attention à ne pas en faire des œillères nous conduisant, nous thérapeute, à ne plus voir notre patient.
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